Handmade remercie «Les Bandits Manchots »
qui ont étés un peu pillés (musique à la fin),
mais en fait pas tant que ça puisqu’ils avaient eux-même
pillé Christian Philibert et son film « Les quatre saisons
d’Espigoule », à revoir ou à
voir d’urgence
!!
Paroles de poires
Trois heures du matin, aéroport de Moussanté,
Kenya :
- We don’t wanna go ! I was born here. This is my country. We don’t
wanna go !
Broum !
Nous n’en saurons pas plus. Jimmy et Mickael sont
des haricots verts extra-fins du Kenya. Comme des milliards de leurs frères
et sœurs ils vont
prendre l’avion ce matin pour rejoindre Rungis
et finir au froid dans un grand supermarché, éclairés
pas des néons.
Nous décidons de suivre leur périple: nous
voici maintenant à Rungis,
où, après avoir parlé
avec les douaniers, consulté des liasses de documents, nous retrouvons
enfin les palettes de nos amis kenyans. Et là, stupéfaction
: ils ont transité par une usine en Chine où ils
ont été
emballés sous vide. Jimmy et Mickael essayent de nous parler derrière
leur plastique : « Ou ou ou ! ». Mais déjà leur
silhouette verte et souple disparaît derrière la buée.
La calvaire de ces haricots, des milliards de fruits et
légumes le vivent chaque jour. Ces cerises chiliennes par exemple
que nous avions enregistré en décembre dernier :
- Puta que frío !
puta mierda ! (Sapristi quel froid ! Flute !
Quel froid !)
- Dejamos nuestro arbol allà, nos cojieron y nos botaron en el
avion… Yo querria estar comida allà ! (Nous avons laissé
notre
arbre là-bas, moi je voulais être mangée là-bas
!)
Manuelito et Manuelita, couple de cerises chiliennes sont au désespoir
tout comme ces poires Bio de Nouvelle-Zélande très remontée
:
- We were organic fruits, orgnanic ! But they put us in a plane, and that
creates lots of contamination ! It is a shame, they killed us and Earth
as the same time ! (Nous étions des fruits Bio !
Mais ils nous
ont mis dans un avion, cela polue beaucoup, c’est une honte, ils
nous ont tués et ont-ils tuent la Terre en même temps !)
En parcourant les allées des hangars, nous avons
pu rencontrer des bananes, des mangues, des lichis du Gabon, tous déracinés,
mais aussi des noix de guaranama…nama. qui semblaient furieuses:
- Uti ka umbidé ! Uti en géda nu y ovo !! Bé sa kaléma
dété !kaléma ! Be sa kaléma !
Nos traducteurs n’ont pas étés en mesure de comprendre
langue de ces noix de guaramanana…manaco, venues de l’île
de Guamani…cara cependant l’expéditeur a
affirmé
que leur consommation était absolument indispensable pour assurer
l’équilibre alimentaire des populations européennes.
Dans un recoin de hangar nous trouvons enfin des pommes
:
- Uaueuh, galgla… froid… 6 mois frigo…6 mois dans le
frigo…
Cette pomme golden ramassée alors qu’elle
était encore dans ses vertes années vient de mourir sous
nos yeux,
mourir de froid après 6 mois de torture dans les frigos.
- Bon, moi z’en peux plus, sans déconner,
z’en peux plus, z’ai pas été fabriqué
pour enregistrer que de la souffrance…
- Bon
écoute Mike, on besoin de toi quand même…
- Ah non mais moi z’arrête tout, là. Prrprprp. (plus
rien).
Nous sommes maintenant au Palis. Mike a bien voulu remarcher,
nous somme dans
le champ d’une famille d’agriculteurs. Il
est 14h, en plein mois de juillet, et nous approchons d’une fratrie
de tomates, bien accrochées sur leur bouquet :
- Putain, mais dégagez quoi, cons de
journalistes, vous pouvez
pas faire la sieste comme tout le monde?
Ces tomates n’en diront pas plus.
Nous passerons l’après midi et la nuit a essayer de reprendre
des forces après une
insolation bien servie. Le lendemain à
6h nous voici de nouveau au jardin avec nos amies tomates, c’est
un vrai plaisir de discuter avec elles :
- Oh ! On est pas bien là, le matin, de bonne heure
? Fache de con ! On est quand même mieux ici qu’en ville !
Eh ? Con de la Bonne-mère !
- Vous voyez, nous on est nés ici, sur ce plant de tomate. Eh bè,
quoi de plus beau pour une
tomate, que d’être mangée
par la famille qui nous a cultivé. Ces des gens…tu vois…
on est liés, quoi ! Enfin, consommés ici, ou disons, dans
le pays quoi, mais jamais passer par le frigo, ça, jamais,
ou le
moins possible du moins.
Mais vous voyez, la famille là, ils ont des toilettes sèches,
un cagador coma se ditz en occitan, parce que entre nous toilette sèche
c’est les pink
floyds, les alternatifs là qui ont réinventé
le cagador, soit dit entre nous, mais bon ils sont bien gentils quand
même… Eh bè quand on les aura nourri ces gens, eh bè
on va retourner au compost, à
notre terre. Si tu veux il y a un
peu de nous même qui va nourrir les générations futures
de tomates et d’humains, via la terre. Eh bè, ça,
pour une tomate, y’a rien de plus beau.
Merci
à Jimmy, Mickael, Manuelito et manuelita,
les noix de guaramanana… Nos pensées se tournent vers Jimmy
et mickaël, morts sous un plastique et cette pomme golden que nous
avons vu mourir aussi. Merci à
Marcel, Josiane, Guillaume et Alan…
- Ou ! es pas Alane, es Alan, òu siam pas americans !
… Euh… donc euh Guillaume et Alane… Alan, du jardin
de la famille Bartàs au Palis.